Assassinats de trois personnes à la basilique de Nice : l’auteur présumé de l’attentat jugé à partir de lundi
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C’est un attentat dont tout le monde se souvient. Les faits avaient eu lieu en plein procès des attentats de janvier 2015, mais aussi après une autre attaque devant les anciens locaux du journal satirique et l’assassinat de Samuel Paty dans les Yvelines. Il est aussi survenu quatre jours après qu’un média proche d’Al-Qaïda a appelé à “égorger” des Français dans “leurs églises”.
Le jeudi 29 octobre 2020, vers 8h30, un homme armé d’un couteau de cuisine avec une lame de 17 cm avait fait irruption dans la basilique de Nice avant de poignarder mortellement trois personnes. Nadine Vincent, 60 ans, avait été retrouvée dans une mare de sang, presque décapitée et présentant dix-sept plaies à l’arme blanche. Poignardée de 24 coups de couteau, Simone Barreto Silva, aide-soignante, mère de famille franco-brésilienne âgée de 44 ans, avait réussi à s’enfuir et à se réfugier dans un restaurant voisin avant de succomber à ses blessures. Le sacristain Vincent Loquès, 55 ans et père de deux filles, avait lui été égorgé. D’autres personnes qui se trouvaient sur le site sont parvenues à échapper à l’attaque.
Lors de son interpellation peu après les faits, l’auteur présumé des faits avait crié “Allah Akbar”, selon les policiers municipaux qui sont intervenus. Plus de quatre ans après cette attaque, ce Tunisien de 25 ans prénommé Brahim Aouissaoui, doit être jugé à partir de ce lundi et jusqu’au 26 février prochain devant la cour d’assises de Paris pour “assassinats” et “tentatives d’assassinats en relation avec une entreprise terroriste”.
Des repérages effectués, la préméditation retenue
Comment cet homme s’est-il retrouvé sur le sol français avec ce projet ? Un peu plus d’un mois avant l’attaque, Brahim Aouissaoui, à l’époque âgé de 21 ans, avait quitté la ville de Sfax en Tunisie dans la nuit du 19 au 20 septembre 2020 à bord d’une embarcation sans prévenir ses proches. Après un passage en Italie, il était arrivé dans la soirée du 27 octobre en gare de Nice.
Grâce aux investigations et aux images extraites des caméras de vidéosurveillance de la ville, les enquêteurs ont pu établir qu’il avait fait des repérages avant ses crimes puisqu’il était passé cinq fois devant la basilique Notre-Dame-de-l’Assomption.
Le 28 octobre 2020, veille de l’attaque, Brahim Aouissaoui avait par ailleurs expliqué dans un message à un compatriote résidant en région parisienne qu’il ne pouvait pas se rendre à Paris comme prévu, où il aurait projeté une attaque, car il n’avait pas l’argent nécessaire pour le faire. “J’ai un autre programme dans ma tête. Que Dieu le facilite” avait-il expliqué à son interlocuteur. Le lendemain, il commettait l’attentat dans la basilique.
Touché par huit balles tirées par les policiers et électrocuté par un taser au moment de son interpellation le jour des faits, l’assaillant avait ensuite été hospitalisé et soigné. Il avait mis en examen le 7 décembre 2020, mais n’a jamais expliqué son geste face aux enquêteurs.
L’accusé dit ne se souvenir de rien
Au cours de ses nombreux interrogatoires, le mis en cause a assuré avoir tout oublié. Pas de quoi convaincre l’accusation d’autant que les écoutes de ses conversations téléphoniques en prison ont, selon elle, démontré “que sa prétendue amnésie était pour le moins très exagérée”. “L’accusé se mure dans une amnésie fictive comme l’ont démontré les deux expertises pratiquées sur lui”, estime Me Samia Maktouf, qui représente la famille du sacristain. “Son amnésie n’est donc qu’une stratégie de défense et de déni des faits”, a-t-elle déploré encore auprès de l’AFP.
“Depuis son réveil du coma, il y a maintenant plus de quatre ans, M. Aouissaoui a toujours indiqué ne pas avoir de souvenirs des actes qu’il aurait pu commettre en octobre 2020″, a insisté de son côté l’avocat de l’accusé, Me Martin Méchin. “Après plus de quatre ans de détention à l’isolement total, la question qui va se poser à l’ouverture de l’audience sera celle de son état de santé mentale actuel, de sa capacité à comprendre les charges qui pèsent contre lui, et donc de sa capacité à pouvoir se défendre comme tout accusé a le droit de le faire”, a souligné l’avocat auprès de l’AFP.
Un attentat pas revendiqué
Cet attentat n’a pas été revendiqué par les groupes jihadistes, qui s’en sont néanmoins félicités. Si aucun message explicite sur un projet d’attaque n’a été retrouvé, les investigations ont démontré “la radicalisation à caractère terroriste” du Tunisien et “sa haine de la France”. Dans un message, il déclarait notamment : “Demain, je partirai pour la France, le pays des mécréants et des chiens”.
Dans son portable ont été retrouvées des photos d’Abdullakh Anzorov, assassin de Samuel Paty, et du président Emmanuel Macron devant le cercueil de l’enseignant, avec un appel “à tuer les mécréants français“. Au cours de son périple en Italie, avant son arrivée sur le sol français, Brahim Aouissaoui avait également consulté la propagande islamiste appelant à se venger de la France après la republication des caricatures du prophète.